Proteus
 

Vénéré en Egypte (Od. IV, 355 ), il possède de nombreux dons dont celui de prédire l'avenir et celui de se métamorphoser à volonté. Il peut être considéré comme le symbole de l’inconscient qui se manifeste sous des formes variées : rêve, réminiscences, illumination, inspiration. Maître des fonds de l'eau, il s'entoure des phoques. Ménélas parvient à saisir ce dieu, à l'aide d'une ruse que lui enseigne la fille de Protée, la nymphe Idothée (Od. IV, 420 ).

Dans la Mythologie grecque, Protée est fils de Poséidon. Divinité marine, mentionnée en particulier par Homère dans l'Odyssée comme « Vieillard de la Mer » et gardien des troupeaux de phoques de Poséidon. Il est doté du don de prophétie et du pouvoir de se métamorphoser. De récents mythographes lui donnent Poséidon (ou Océan selon les auteurs) comme père et Téthys comme mère. Cependant, certaines traditions non homériques de la guerre de Troie (représentées notamment par Hérodote ou Euripide) font de Protée un roi égyptien et lui donnent comme demeure l'île de Pharos, près de l'embouchure du Nil. Sur Pharos, il accueillit notamment Dionysos dans les errances du jeune dieu. Selon cette hypothèse, son nom pourrait n'être que la transcription de Prouïti, « la Sublime Porte » (un des épithètes des Pharaons).

Non seulement il savait tout du passé et du présent, mais encore il avait le pouvoir de prédire l'avenir. Et malgré ce don, il se gardait bien de partager facilement son savoir. Pour le consulter, il fallait le capturer par surprise durant sa sieste de midi car, à ce moment-là, il gagnait les grottes creuses en compagnie des phoques pour s'abriter des chaleurs du jour. Et même capturé, il pouvait encore prendre toutes les formes physiques qu'il voulait afin de s'échapper.

 

Dans l'Odyssée, Ménélas raconte à Télémaque qu'il y fut encalminé sur le chemin du retour à Sparte après la guerre de Troie. La fille de Protée lui révéla comment forcer son père à lui dire lequel des dieux il avait offensé et comment il pourrait se racheter pour rentrer chez lui. Il se cacha parmi les phoques de Protée et quand celui-ci émergea de la mer pour dormir parmi eux, Ménélas parvint à le capturer. Afin d'échapper à son assaillant, Protée prit tour à tour la forme d'un lion, d'un serpent, d'un léopard, d'un cochon et même de l'eau et d'un arbre. Mais ces métamorphoses furent vaines et il dut répondre aux questions de Ménélas. Ce dernier apprit ainsi que son frère Agamemnon avait été tué à son retour chez lui, qu'Ajax le Petit était mort dans naufrage et qu'Ulysse avait échoué sur l'île de Calypso.

Une autre histoire raconte qu'un jour, les abeilles d'Aristée, fils d'Apollon, étaient toutes mortes d'une maladie apportée par les Dryades. Aristée demanda secours à Cyrène, sa mère. Celle-ci lui dit que Protée pouvait lui apprendre comment éviter un autre désastre de la sorte, mais seulement s'il en était forcé. Aristée devait immobiliser le dieu peu importe la forme qu'il prendrait. Ainsi, Protée dut l'informer qu'il devait sacrifier un taureau aux dieux, laisser la carcasse sur les lieux du sacrifice et y retourner après trois jours. Quand Aristée revint à cet endroit, il trouva un essaim d'abeilles dans la carcasse et la rapporta dans son rucher. Les abeilles ne connurent plus jamais la maladie.

Protée eut plusieurs enfants. Selon Homère, celle qui porta secours à Ménélas se nommait Idothée. Apollodore mentionne Polygonos et Télégonos, qui défièrent Héraclès à Torone et qui furent tués. De plus, selon Philostrate (Vie d'Apollonius de Tyane, I, 4), la mère d'Apollonios de Tyane eut la vision de Protée en rêve, qui lui annonça une naissance. Quand elle lui demanda de quoi elle accoucherait, le Vieillard de la mer répondit simplement : « De moi ».

La tragédie Hélène d'Euripide fait mention de Protée, un roi d'égypte qui épousa la Néréide Psamathée, bien que la plupart des traditions aient donné à cette dernière le roi éaque comme époux. Dans cette tragédie, le personnage Théoclymémos était le fils de ce roi et un autre passage suggère l'existence d'une fille, Ido. Protée, que l'on ne voit pas non plus, se rapproche bien peu du « Vieillard de la Mer ».

Bien que partageant la faculté de changer de forme à l'envi avec d'autres divinités grecques marines, le nom de Protée a servi de radical en latin — et à partir de là dans la plupart des autres langues européennes — pour former des termes comme protéiforme, avec cette connotation de « polymorphisme spontané ».

Et lorsqu'on commença à découvrir un certain nombre de très grosses molécules organiques qui avaient, à composition chimique identique, la possibilité de se replier en des formes très différentes les unes des autres, on leur donna fort logiquement le nom de protéines.